Vents mauvais pour le traité de libre-échange transatlantique

Vents mauvais pour le traité de libre-échange transatlantique

Editorial. Barack Obama a très envie de conclure le traité de libre-échange transatlantique, connu sous les sigles équivalents TTIP et Tafta, avant son départ de la Maison Blanche, en janvier prochain. Il l’a dit clairement, lors de sa récente visite en Europe. Les présidents américains, à l’approche de la fin de leur mandat, sont généralement soucieux de l’héritage qu’ils laissent à la postérité. M. Obama a signé l’an dernier un traité similaire avec onze Etats d’Asie et du Pacifique ; il est naturel qu’il souhaite parfaire son uvre de libéralisation du commerce avec, cette fois, le très attrayant marché que représentent les 500 millions de consommateurs européens.

En Europe, les opinions publiques se méfient d’un projet de traité sur lequel leurs dirigeants ont fait trop peu de pédagogie

Théoriquement, un tel traité est aussi dans l’intérêt de l’Union européenne. Il est pourtant de moins en moins probable que les négociateurs américains et européens parviennent à un accord sur le TTIP d’ici à la fin de l’année. Le treizième round s’est achevé vendredi 29 avril à New York sans progrès notables. Le prochain est prévu pour juin, mais, en dépit du volontarisme affiché par Barack Obama, on ne décèle guère l’excitation de la ligne d’arrivée, de part ou d’autre.

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Pourquoi ‘ Parce que depuis que les négociations ont été ouvertes, en 2013, le vent a tourné. Le vent mauvais est politique, plus encore qu’économique. Et ce, des deux côtés de l’Atlantique.

Il suffit de prêter attention aux slogans martelés par Donald Trump et au large écho qu’ils rencontrent dans l’électorat américain pour le comprendre. Le commerce mondial est le repoussoir que le candidat à la primaire républicaine brandit à longueur de meetings face au sentiment de déclin des classes laborieuses, dont il se veut aujourd’hui le protecteur.

Chute spectaculaire de l’image du libre-échange

En Europe, les opinions publiques se méfient d’un projet de traité sur lequel leurs dirigeants ont fait trop peu de pédagogie et qui reste entouré de mystère et d’idées fausses. Une étude récemment publiée par la Fondation allemande Bertelsmann illustre la chute spectaculaire de l’image du libre-échange : le taux d’opinions favorables au TTIP est passé de 55 % à 17 % en Allemagne de 2014 à aujourd’hui, et de 53 % à 15 % aux Etats-Unis.

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Les autorités peinent à convaincre les opinions publiques

En Europe, l’opposition au projet de traité transatlantique est moins fondée sur le rejet de la mondialisation que sur la peur de se voir imposer par le géant américain, dans un souci d’uniformisation, des pratiques et des normes contraires aux traditions et à la culture du Vieux Continent : des craintes caricaturées par le fameux spectre du poulet lavé au chlore, pourtant définitivement éliminé par les négociateurs.

Malgré les efforts méritoires de la commissaire européenne au commerce, Cecilia Malmström, en faveur d’une transparence accrue sur la gestation du TTIP, la Commission de Bruxelles, à laquelle les Etats membres ont confié le mandat de négociation, est mal outillée pour faire le travail politique indispensable auprès des opinions publiques. Ce travail, c’est aux gouvernements élus de le faire.

Mais de Londres à Berlin, et de Paris à Rome, ces dirigeants ont des sujets plus brûlants à traiter et, pour certains, des échéances électorales à préparer : le moment est mal venu. Si M. Obama tient vraiment à faire accélérer les négociations, c’est, finalement, à lui de faire un geste pour convaincre les Européens, en cédant du terrain sur les sujets les plus contentieux, l’accès aux marchés publics américains et l’agriculture.

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