Les Argentins manifestent contre les licenciements et l’austérité

Les Argentins manifestent contre les licenciements et l'austérité

Le Monde
| 30.04.2016 à 09h35
Mis à jour le
30.04.2016 à 14h08
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Par Christine Legrand (Buenos Aires, correspondante)

C’est la fin de la lune de miel entre les syndicats péronistes et le président de centre-droit Mauricio Macri, au pouvoir depuis le 10 décembre 2015. Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté, vendredi 29 avril, à Buenos Aires, pour protester contre la vague de licenciements et l’inflation, à l’appel des cinq principales centrales syndicales argentines.

« Une convocation historique », a salué Hugo Moyano, le puissant chef de la Confédération générale des travailleurs (CGT), soulignant que c’est la première fois, dans l’histoire du pays, que les syndicats, traditionnellement divisés entre différents secteurs du péronisme, s’unissent pour interpeller le gouvernement.

Dur revers pour le gouvernement

« Il y a eu 200 000 licenciements en quatre mois », a dénoncé M. Moyano, tant dans le secteur public que privé. « Nous ne sommes pas contre le gouvernement, nous sommes en faveur des travailleurs », a-t-il précisé. M. Moyano avait jusqu’à présent privilégié le dialogue avec le président Macri, soulignant la difficile situation reçue en héritage par le nouveau gouvernement après huit ans de gestion de l’ex-présidente péroniste Cristina Kirchner (2007-2015), durement critiquée par la CGT. Les chefs syndicaux ont demandé à l’unisson que les travailleurs soient « entendus et respectés ». Ils ont menacé d’une grève nationale si M. Macri, comme il l’a annoncé, mettait son veto à une loi contre les licenciements, approuvée le 28 avril par le Sénat, et qui prévoit de doubler le montant des indemnités en cas de licenciement.

C’est un dur revers pour le gouvernement qui, tout en étant minoritaire au Parlement, avait réussi à faire des alliances avec l’opposition pour faire approuver le récent accord avec les fonds spéculatifs afin de régler la dette argentine, après quinze ans de conflit avec les créanciers. Fort de ce succès, M. Macri, misant sur l’appui des marchés financiers, avait prédit une avalanche d’investissements étrangers. Ils s’annoncent lents à venir et limités alors que la patience des citoyens s’épuise face à des augmentations généralisées, des combustibles aux denrées alimentaires, en passant par les services publics, allant jusqu’à 700 % pour les factures d’électricité.

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Les Argentins vivent dans la peur de perdre leur emploi et souffrent de voir leurs salaires réduits comme peau de chagrin face à l’inflation. 1,4 million sont tombés dans la pauvreté et quelque 350 000 dans l’indigence au cours des cent premiers jours du président Macri, selon une récente enquête de l’Université catholique argentine, proche du pape argentin François.

Réalité alarmante

Fils d’un riche industriel, M. Macri reproche aux hommes d’affaires de ne pas faire les efforts nécessaires pour réactiver l’économie. Depuis de longues semaines, les pluies intenses et les inondations présagent de mauvaises récoltes alors que les céréales sont la principale source d’entrée de devises.

La majorité des économistes prédisent une grave récession, conséquence d’une production qui tourne au ralenti, d’une consommation réduite, d’une inflation galopante et des retombées de la crise du Brésil, principal partenaire économique. Ils anticipent une baisse de 3 % du PIB en 2016.

Une réalité alarmante qui fait craindre de nouvelles et violentes turbulences sociales sur fond de perte de crédibilité des politiciens. Le pays assiste désabusé à un déballage quotidien d’affaires de corruption qui impliquent aussi bien Cristina Kirchner que Mauricio Macri qui est apparu dans le scandale des « Panama papers » comme président de sociétés familiales offshore.

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