François Fillon oriente sa justice sociale vers les classes moyennes et les familles
Le Thatcher de la Sarthe s’est donc décidé à enrober son choc libéral d’une once de douceur. Mardi 7 juin, François Fillon, candidat à la primaire de la droite, au programme le plus austère, a livré sa vision de la « vraie justice sociale » lors d’un meeting à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). « L’assistance est un droit mais l’assistanat est un piège, a lancé l’ancien premier ministre devant 1 500 personnes et des centaines de drapeaux français. Mais ne cherchons pas des boucs émissaires parmi les déshérités de notre société. Ce n’est pas en stigmatisant les pauvres d’entre nous que nous deviendrons plus riches et ça n’est pas en stigmatisant les riches que nous serons moins pauvres. »
Après avoir mis l’accent pendant des mois sur le sang, les larmes et les efforts à fournir pour relancer la France, François Fillon a cette fois-ci évoqué les « sans-grade », les « sans carnet d’adresse », les « exclus du système », le « plafond de verre qui fige leur destin »’ « Sans la fraternité, et je reprends ici les mots du général de Gaulle la France s’écarterait de sa vocation humaine au milieu de l’humanité’ », a déclaré le candidat en faisant ressurgir ses jeunes années de gaulliste social, et en citant également Philippe Séguin.
Une redistribution ciblée
Fillon le libéral serait-il devenu, le temps d’un meeting, l’apôtre de la solidarité et de la relance ‘ Malgré la coloration nouvelle de son discours, la redistribution façon Fillon reste très mesurée. Alors qu’il envisage 110 milliards d’économies sur le quinquennat (baisse de 10 % du nombre de fonctionnaires, alignement des régimes de retraites, etc.), l’ancien premier ministre veut « redonner 10 milliards de pouvoir d’achat supplémentaires aux classes moyennes ». Cette somme serait prélevée sur les 50 milliards que veut redistribuer le député de Paris aux entreprises.
M. Fillon cible cette réorientation vers les classes moyennes supérieures et les familles, deux électorats stratégiques en vue de la primaire de la droite. S’il est élu en 2017, l’ancien premier ministre veut ainsi rétablir l’universalité des allocations familiales et porter le plafond du quotient familial à 3 000 euros.
Il reviendrait alors sur deux décisions du quinquennat de François Hollande (la modulation des allocations familiales en fonction des revenus et l’abaissement du plafond de 2 000 euros à 1 500 euros) dénoncées comme un « matraquage » et une atteinte à la politique familiale par les dirigeants de l’opposition depuis 2012. « J’entends répondre à l’angoisse des classes moyennes et faire de la famille l’un des socles de notre solidarité », a-t-il promis.
Les deux autres principales annonces de François Fillon sont un renforcement de la participation et de l’intéressement des salariés aux bénéfices des entreprises et la mise en place d’un plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté. Un plan qui consiste surtout en une meilleure coordination des acteurs de la solidarité. En pleine crise sociale entre l’exécutif et la CGT, l’ancien premier ministre, souvent moqué par Nicolas Sarkozy pour son discours trop rigoriste pour gagner une élection, veut démontrer que son projet ne serait pas qu’une cure d’austérité.
Une allocation unique « strictement plafonnée »
Mais ce discours important à moins de six mois de la primaire n’est pas un virage dans la campagne de François Fillon. Avant l’été, il a mis l’accent sur la solidarité, mais sans rien changer à l’esprit et aux grandes lignes de son projet. « La vérité, c’est qu’on ne peut viser le plein-emploi, on ne peut avoir la meilleure santé du monde, l’école gratuite pour tous, une protection sociale pour chacun, sans réformer radicalement notre système et sans se retrousser les manches », a t-il répété, mardi soir, avant d’accuser la CGT d’être « contre la liberté », de tonner contre l’indécence des « idéologues d’extrême gauche qui ont défendu les régimes autoritaires comme Cuba et le Venezuela » et de s’emporter contre « le changement de sociologie dans les quartiers ».
En matière de solidarité, il n’a pas non plus caché son intention de réunir toutes les prestations sociales en une allocation unique, « la révolution du bon sens ». « Son montant maximal sera strictement plafonné afin qu’il ne dépasse pas les revenus du travail », a-t-il précisé sous les acclamations de ses partisans.
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