Macron et Valls deux façons d’enterrer le hollandisme

Macron et Valls deux façons d'enterrer le hollandisme

Avec toute l’insolence de ses 38 ans, Emmanuel Macron lui a volé le Graal du changement. Alors, Manuel Valls riposte avec ses propre armes, qui ne sont plus celles du jeune homme qu’il a longtemps été et qui pourtant affleure à chaque page de Society, le magazine qu’il a choisi pour organiser la contre attaque : on y voit des portraits de Valls adolescent, de Valls conquérant, de Valls aguerri. La politique c’est d’abord de l’image et aussi de la part de marché. Longtemps, le premier ministre a dominé en popularité dans l’électorat jeune et puis Macron l’a rattrapé. Se battre donc.

Il y a un mois, le magazine faisait sa « une » sur Macron avec ce titre insolent : « Le monde selon Macron. » Cette semaine, Valls tient la vedette avec ce titre défensif : « On a fait des erreurs. » Et cela résume tout le fossé qui sépare les deux hommes, en concurrence frontale sur le créneau de la rénovation : Macron est suffisamment novice en politique pour pouvoir oser faire oublier le bilan, Valls est désormais trop lesté pour prétendre s’en exonérer totalement.

Là où le premier fonce en promettant de construire une offre politique nouvelle sur les décombres du système, le second est contraint de godiller, à la fois critique et complice du hollandisme, parce que depuis mars 2014 il est premier ministre et qu’il aime gouverner. Mais lorsque Valls tance l’insubordination de Macron, lorsqu’il condamne « les divisions » et « la cacophonie » qui en résultent, il enterre aussi le conquérant qu’il fut, lorsque Jean- Marc Ayrault était premier ministre et que lui se battait pour occuper sa place.

Valls pose le postulat qu’il a gagné, que sa ligne jadis minoritaire est devenue suffisamment centrale à gauche pour devenir « rassembleuse ». Il en veut notamment pour preuve la politique de l’offre à laquelle François Hollande a dû se rallier devant la gravité de la situation économique. Mais les faits sont têtus :la conversion présidentielle remonte à janvier 2014, elle est donc antérieure à la nomination de Valls à Matignon et c’est bien cela qui rend aujourd’hui si compliquée l’autonomisation du premier ministre.

Macron en profite pour s’émanciper. Il joue l’homme neuf, milite sans complexe pour le social libéralisme, seule façon, selon lui, de ramener en France la croissance et la confiance. Dans la foulée, il brise un à un les tabous auxquels Valls aimait naguère s’attaquer : les 35 heures ou encore l’ISF.

Le ministre de l’économie abat symboliquement tous les murs qui séparent, en économie, la gauche de la droite en faisant le pari que le clivage ne tient déjà plus. Valls empreinte lui aussi sans vergogne à la droite sur le thème de la sécurité et de l’identité mais refuse encore d’abattre la cloison : pour lui, la gauche et la droite ce n’est pas pareil.

Macron pense que les partis sont morts et que la présidentielle rebattra toutes les cartes. Valls croit à la recomposition mais refuse d’enterrer les partis. L’un joue les flibustiers du système, l’autre s’accroche à son parcours politique déjà dense député, maire, ministre, premier ministre pour s’affirmer de gauche et s’approprier le thème du rassemblement.

Plus Macron se déporte sur sa droite, plus Valls s’ancre à gauche en insistant désormais sur le mot « égalité ». Et pour que cela ait de l’épaisseur, il met à l’étude une nouvelle conquête sociale :« le revenu universel », censé prolonger, au-delà de 2017,  le RMI que Michel Rocard, alors premier ministre de François Mitterrand, avait fait naître en 1988.

Rocard, la référence commune aux deux hommes, aussi proche de Valls que de Macron.  Lui aussi avait rêvé de rénovation et cru au « big bang « mais au bout du compte le vieux système avait résisté et perduré. C’était il y a vingt-trois ans.

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