Trump veut que le Congrès enquête sur les écoutes dont il se dit victime
Le président américain accuse son prédécesseur Barack Obama de l’avoir placé sur écoute avant l’élection présidentielle du 8 novembre.
La jeune présidence de Donald Trump s’est enrichie de nouveaux épisodes baroques, samedi 4 et dimanche 5 mars. Dans une série de messages publiés sur son compte Twitter, le président américain a en effet affirmé que son prédécesseur, Barack Obama, l’avait placé sur écoute pendant la campagne présidentielle. Ces affirmations ont poussé, selon la presse américaine, le directeur de la police fédérale, James Comey, à demander à son département de tutelle, le ministère de la justice, de démentir publiquement un président de facto accusé de mensonge, ou d’affabulation.
Alors que la nouvelle administration est engluée dans les soupçons de contacts avec la Russie, un pays accusé par le renseignement américain d’avoir voulu peser sur l’élection présidentielle, les attaques de M. Trump ont été lancées samedi de bon matin. « Terrible ! Je viens de découvrir que le président Obama avait mis mes lignes sur écoute dans la Tour Trump juste avant [ma] victoire. Sans rien trouver. C’est du maccarthysme ! », a-t-il commencé. « Comment le président Obama a-t-il pu tomber si bas pour mettre mes téléphones sur écoute durant ce processus électoral sacré. C’est Nixon-Watergate. Un pauvre type (ou un malade) », a-t-il poursuivi.
« Règle d’or »
Sur quels éléments non cités dans ses messages M. Trump s’est-il appuyé pour mettre en cause un ancien président, comme sans doute aucun locataire de la Maison Blanche avant lui Manifestement sur un brûlot du polémiste ultraconservateur Mark Levin, qui anime un talk-show à la radio. Ce dernier a accusé, le 2 mars, l’ancien président démocrate d’un « coup d’Etat silencieux ». Cette accusation a été reprise le lendemain, enrichie, par le site engagé Breitbart News, dont l’ancien responsable, Stephen Bannon, est aujourd’hui le conseiller stratégique de M. Trump.
Manifestement prise au dépourvu, l’équipe de communication du président est restée silencieuse pendant près de vingt-quatre heures avant que son porte-parole, Sean Spicer, publie un communiqué demandant à ce que « dans le cadre de leurs enquêtes sur l’activité russe, les commissions sur le renseignement au Congrès exercent leur autorité de supervision pour déterminer si les pouvoirs d’enquête de la branche exécutive ont été outrepassés en 2016 ». M. Spicer n’a pas ajouté de sources plus convaincantes que les articles, qualifiés de « rapports », jugés « très inquiétants ».
Lire aussi :
Robert O. Paxton : « Le régime de Trump est une ploutocratie »
Alors que les responsables du Parti républicain ont observé pendant tout le week-end un silence prudent, l’ancien directeur national du renseignement de Barack Obama, James Clapper, a formellement démenti dimanche matin, sur NBC, toute mise sur écoute. Une telle décision, qui relève de la police fédérale, nécessite le feu vert d’un juge. Un porte-parole de M. Obama avait déjà fermement contesté les propos de M. Trump samedi. « Ni le président Obama ni aucun responsable de la Maison Blanche, n’ont jamais ordonné la surveillance d’un quelconque citoyen américain, avait assuré Kevin Lewis. Toute suggestion du contraire est tout simplement fausse. »
« Une règle d’or de l’administration Obama était qu’aucun responsable de la Maison Blanche ne devait interférer avec une quelconque enquête indépendante menée par le ministère de la justice », avait ajouté M. Lewis, dans une allusion voilée à une initiative du chef de cabinet du président, Reince Priebus. Comme l’a confirmé la Maison Blanche, ce dernier a demandé au FBI de prendre contact avec des journalistes pour contester le contenu d’un article du New York Times relatif aux relations éventuelles entretenues avec la Russie par des proches ou des membres de l’équipe de M. Trump.
Exaspération croissante
En toile de fond de cette polémique, dont les conséquences restaient impossibles à évaluer dimanche : l’exaspération croissante de la présidence par rapport aux « fuites » qui alimentent la presse. Mark Levin accuse régulièrement un « Etat profond », favorable aux « progressistes » qu’il stigmatise à longueur de tribunes, de multiplier les embûches envers la nouvelle administration. Stephen Bannon a, de son côté, publiquement défendu la nécessité de la « déconstruction de l’Etat administratif » devant un forum conservateur, le 23 février.
Un proche de M. Trump, Michael Flynn, nommé en novembre 2016 conseiller à la sécurité nationale, a démissionné de ses fonctions le 13 février pour avoir menti sur le contenu de discussions avec l’ambassadeur russe à Washington, Sergueï Kislyak. Le 2 mars, le ministre de la justice, Jeff Sessions, s’est récusé préventivement pour toute enquête visant la campagne. Il avait passé sous silence pendant une audition sous serment au Sénat, le 10 février, deux rencontres avec le même diplomate.
Lire aussi :
Les interférences russes de la Maison Blanche